Coucou, maman
Un douillet
silence régnait dans la pièce. Sarah regardait tendrement, dormir son bébé.
Elle ne finissait pas de la contempler, émerveillée et toujours aussi étonnée
d’avoir mis au monde une si belle petite fille. C’était pour elle son grand
trésor ! Assise près du berceau, elle détaillait son joli visage aux
traits si fins. Une fossette coquine sur chaque joue, un mignon et minuscule
nez, de fines lèvres bien rouges et de longs cils ourlés, c’était un portrait
qu’elle aurait aimé dessiner si elle avait la chance d’être une artiste. L’enfant
ouvrit les yeux d’un vert profond et regarda sa maman comme si elle répondait à
son appel muet ; un petit sourire se dessina et elle tendit les
bras :
–Bonjour mon petit ange. Il y a un bon moment que je
veille sur ton sommeil. As-tu fait de beaux rêves ? Je t’aime si fort que
je suis sûre que tu comprends déjà tout ce que mon cœur renferme d’amour pour
toi »
Et ô miracle,
maman entendit des phrases muettes mais
combien claires, transmises par son enfant. Un dialogue à moitié télépathique
s’instaura :
– Ne sois pas étonnée si tu saisis mes réponses, ma
petite maman chérie. Un lien très fort nous unit, tellement fort que les mots
sont inutiles.
– Mais comment
est-ce possible ? Est-ce que je rêve ? Mon imagination me joue des
tours !
– Pas du tout. Je te
parle. Depuis que je suis sortie de ton ventre où j’étais comme dans un cocon,
protégée, bercée par ta voix si douce, j’avais envie de te dire merci de
m’avoir donné le jour.
– Tu te rappelles
donc ce qui se passait lorsque tu étais dans mon corps ?
– Oh oui, tout.
J’ai participé à tes promenades dans la forêt, à tes interminables queues dans
les grands magasins. J’ai savouré avec toi ce que tu as goûté et mangé, mais
pourtant je n’ai pas tout aimé. Certaines choses étaient trop amères ou
piquantes. Je te donnais des coups de pieds pour attirer ton attention
mais tu ne comprenais pas mon appel.
– Tes coups de
pieds étaient pour moi la révélation que tu étais bien là, tout près, dans mon
être. Ils représentaient la vie que ton papa et moi avions avec amour,
confectionné. Et chacun de tes coups de pieds me procurait une joie immense et
accélérait les battements de mon cœur.
– Ha ! Je
comprends les boum boum boum qui résonnaient souvent à mes oreilles. Ils
coïncidaient parfois avec des soubresauts, des mouvements de va et vient que tu
avais. Tu me berçais déjà ? »
Maman sourit,
émue, un peu gênée, assez amusée :
– Non ma chérie, je ne te berçais pas. Ton papa et moi
nous nous aimions très fort, pardon si nous t’avons dérangée.
–Pas dérangée ! Mais quelle drôle de façon de
s’aimer ! Je pense que j’apprendrai plus tard.
–Mon petit amour, nous avons là,
une conversation vraiment surréaliste. Je me pince et je vois bien que je suis
éveillée. Quand je raconterai cela à ton papa, il ne voudra pas me croire et
craindra même que ma raison s’en soit allée.
–Le mieux c’est que ceci reste
notre secret. Une communion entre nous deux, une complicité qui durera sinon
toujours, du moins longtemps… J’ai encore un peu sommeil… »
La petite fille referma les yeux
et sa respiration redevint paisible. Elle était repartie au pays des rêves.
Maman se leva doucement de son
siège, les jambes tremblotantes ; elle se pencha sur le berceau, caressa
avec douceur les cheveux de Bébé et déposa un tendre baiser sur la menotte
abandonnée avec confiance sur sa poitrine…
Mer 20 Jan - 9:46