La nature se déchaîne…
Le vent souffle. La mer semble démontée. Les marins
pêcheurs couverts jusqu’au cou regardent les vagues d’étrave s’échouer au bord
de leur bateau. Ce n’est pas aujourd’hui que la pêche sera bonne, à moins que
ce ne soit une pêche miraculeuse !
Il fait encore jour. Et pourtant en regardant ce cliché,
une sensation d’obscurité m’envahit. Pas de couleurs, une photo terne qui
m’angoisse et me met mal à l’aise… Pour moi, c’est comme si je faisais un
cauchemar et que je n’arrivais pas à me réveiller. Une boule me serre la gorge.
Ma poitrine est serrée et je crois manquer d’air.
J’adore une croisière en bateau. Mais si j’avais connu
cette photo avant d’avoir mis la première fois le pied sur un bateau, je crois
que jamais de ma vie, je n’aurais osé le faire. Comment une simple photo
peut-elle me procurer ce mal être, cette sensation d’étouffement ?
Comme par hasard, aujourd’hui le temps est gris. Une pluie
fine et régulière frappe la vitre de la pièce où je suis assise entrain
d’écrire. Décidément, je ne suis pas dans mon élément en regardant ce cliché.
Je me lève et je mets le disque « Le piano sous la mer de
Saint-Preux ».
Les yeux fermés, il me fait voyager. Je suis très vite
transportée, ailleurs, là où le navire se dirige avant de sombrer dans cette
mer turquoise. C’est merveilleux. J’assiste au départ du navire. Le clapotis
des vagues me berce. Puis un grondement survient, une tempête se déchaîne en
même temps que l’on entend le chant des sirènes. Parfois leur appel est
mélodieux, sensuel ; parfois, leur incantation fait penser aux moulins à
prières tibétains. Les vagues puissantes, menaçantes, montent, se dressent,
mugissent et engloutissent le navire qui s’enfonce petit à petit dans
l’immensité de l’Océan. Et là, j’assiste à un concert sous-marin. La rencontre
avec l’ivresse des profondeurs ; c’est le gouffre amer et l’abîme. On
croirait entendre le déchaînement des vagues, sentir le vent, pleurer le piano.
C’est tour à tour, joyeux, vibrant, affolant, désespéré, prenant, captivant,
émouvant enivrant. Ça remue et enchante.
… Le disque s’est arrêté. Pendant un temps, cette évasion
au pays du rêve m’a détendue, apaisée. La pluie continue de tomber, plus forte,
plus rapide comme des cascades qui ruissellent, cristallines. Je suis bien.
Dans ma tête, j’entends encore la mer démontée, courroucée, déchaînée qui se
calme, s’apaise. Mon cœur déborde d’attendrissement, de joie pure et vibre à
l’unisson de la musique qui s’est tue…
Je regarde à nouveau la photo et je m’interroge :
« Qu’a voulu exprimer la photographe ? Dans quel état d’âme se
trouvait-elle ? Bah ! Chacun a sa propre vision…
Le 23 janvier 10
Sam 23 Jan - 18:34